INTERVIEW :
Que se passe-t-il à présent au Kosovo ?
Un film brise le silence.
Michel Collon et Vanessa Stojilkovic
sur leur nouveau film Les Damnés du Kosovo
Chassée de son appartement à Pristina, Maria n'a eu la
vie sauve que parce qu'elle parlait albanais. Son neveu, interprète
pour l'ONU, a été assassiné sauvagement. Le mari
de Silvana a été kidnappé, elle est sans nouvelles
depuis deux ans. La maison de Stanimir a été brûlée.
Qu'ont-ils en commun? Ils sont Serbes et vivent, ou plutôt survivent
au Kosovo. Pourquoi les médias ne parlent-ils plus de cette région
occupée par l'Otan ? Le nouveau film de Michel Collon et Vanessa
Stojilkovic brise le silence. Et met en garde tous les peuples menacés
par les guerres de la mondialisation...
Quel a été le point de départ de ce film ?
Michel Collon. La propagande de guerre de 1999 et les médiamensonges
du porte-parole de l'Otan, Jamie Shea, m'avaient été intolérables.
Tout comme le silence médiatique imposé ensuite sur le Kosovo.
L'Otan avait promis monts et merveilles, mais pourquoi ne nous disait-on
plus rien des gens qui vivaient là-bas ? J'ai donc effectué
un reportage sur place...
La situation n'est pas réglée ?
Michel Collon. Au contraire ! Ce que j'ai constaté et ce que le
film montre, c'est une accumulation de souffrances qu'on n'imagine pas
ici : attentats à la bombe, assassinats, destructions des maisons
ou expulsions, kidnappings et angoisses des familles, menaces permanentes...
Le constat est accablant: une véritable purification ethnique a
chassé du Kosovo la plupart des non - Albanais et terrorise ceux
qui restent. Il fallait absolument briser ce silence.
J'avais des images explosives, mais je ne suis pas cinéaste. Il
me fallait donc trouver quelqu'un qui s'engage à fond pour transformer
ces images en un message capable d'alerter l'opinion. Après un
premier essai arrêté pour maladie, je suis entré en
contact par Internet avec Vanessa. Malgré son jeune âge,
j'ai immédiatement senti que c'était elle qu'il fallait.
Pourquoi ? Qui êtes-vous, Vanessa ?
Vanessa Stojilkovic. Ma famille d'origine vit au Kosovo et en Serbie centrale.
J'y vais chaque été, j'y ai des amis. En France, j'ai grandi
au sein de la communauté yougoslave, je connais bien ce peuple,
sa culture, son histoire.
J'avais 13 ans quand la guerre a commencé en 91. Et aujourd'hui
encore, je vis l'angoisse et les deuils. Tant de morts injustes et inutiles
- à cause de la guerre, mais aussi à cause de l'embargo,
c'est-à-dire la privation de médicaments vitaux - vraiment,
nous n'avons pas fini d'en ressentir les conséquences! Le peuple
yougoslave reste sous la menace, la guerre de 99 tue toujours des gens.
Le stress de la guerre et des bombardements a provoqué d'énormes
problèmes d'hypertension qu'ils n'ont pas les moyens de soigner.
Et les cancers croissent à une allure fulgurante. Les gens meurent
dans la souffrance. Le bilan actuel de la guerre, pour toute la Yougoslavie,
ce n'est pas seulement des morts, mais aussi l'état physique et
psychologique de ceux qui restent. Et leur manque d'avenir.
Au fil des années , j'avais rassemblé quantité de
témoignages d'ex-Yougoslaves sur la guerre, les réfugiés,
la survie et la solidarité des peuples. Les articles de Michel
concordaient avec ce qui se passait réellement là-bas.
Grâce à lui, j'ai pu me rendre utile. En aidant à
faire connaître la vérité comme me l'avaient demandé
toutes ces personnes dont je notais les témoignages bouleversants.
Les images et interviews ramenées par Michel du Kosovo me sont
apparues comme une mine d'or. C'étaient des preuves irréfutables
!
Michel Collon. En écoutant la souffrance de Vanessa, j'ai ressenti
l'injustice qui avait été commise envers ces gens diabolisés
par les médias et interdits de parole ! On n'a écouté
les Yougoslaves qu'à travers les filtres et les médiamensonges
de l'Otan. La situation est bien plus complexe.
J'ai admiré qu'une toute jeune fille, avec peu d'expérience,
se lance dans la tâche impressionnante de réaliser un film
documentaire ! Elle a tout porté sur ses épaules : réécrire
le scénario, transformer le découpage, effectuer le montage.
Vraiment, on doit faire confiance aux jeunes !
Le résultat est un film que certains ont qualifié de bombe,
sans mauvais jeu de mot. Une bombe politique ?
Michel Collon. Rappelez-vous ce que disait Bill Clinton en déclenchant
les bombardements sur la Yougoslavie : «Notre fermeté est
le seul espoir pour le peuple du Kosovo de pouvoir vivre dans son propre
pays. Imaginez si nous fermions les yeux et si ces gens étaient
massacrés, à la porte même de l'Otan. Celle-ci serait
discréditée.»
Clinton parlait des Albanais. Mais aujourd'hui, les Serbes et les autres
minorités nationales qui vivaient au Kosovo depuis des siècles
- Roms, Gorans, Turcs, Egyptiens, Musulmans... , tous subissent un martyre.
La présence des troupes de l'Otan ne freine pas ces violences
?
Michel Collon. Non seulement elle ne les freine pas, mais le film apporte
plusieurs documents exclusifs qui révèlent la complicité
de l'Otan avec leurs auteurs : les milices de l'UCK séparatiste.
Récemment, des policiers allemands ont encore accusé les
troupes américaines de protéger les meurtriers...
Vanessa Stojilkovic. Ma motivation principale a été d'ouvrir
les yeux à tous ceux d'Europe occidentale qu'on a désinformés.
Leur faire savoir, par exemple, que les non-Albanais sont privés
de soins de santé décents : que des gens meurent parce qu'ils
sont privés des équipements médicaux nécessaires.
Que les enfants serbes et autres sont privés d'écoles. Qu'une
centaine d'églises ont été démolies. Et que
ça continue. Le Kosovo reste un enfer.
Est-ce un film «pro-serbe» ?
Michel Collon. Non. D'abord, il donne aussi la parole aux nombreuses minorités
nationales, elles aussi persécutées, «nettoyées».
Les Roms, par exemple, pourchassés un peu partout en Europe, ces
temps-ci. Et martyrisés au Kosovo. Et aussi les Juifs, Gorans,
Musulmans, Turcs, Egyptiens... Des minorités dont on ne parle jamais.
Ensuite, de nombreux Albanais se retrouvent également victimes
d'un système maffieux basé sur la terreur. L'un d'eux a
pu témoigner devant notre caméra. Il était persécuté
parce que marié à une Serbe !
En fait, je ne suis ni pro-serbe, ni pro-albanais. Je pense que tous ces
peuples se retrouvent victimes de stratégies cachées : les
Etats-Unis voulaient, comme leurs alliés, détruire une Yougoslavie
trop à gauche. Ils voulaient contrôler les routes du pétrole
qui passent précisément par là. Ils voulaient installer
leur super-base militaire de Camp Bondsteel. Et ils y ont réussi,
en utilisant - non : en excitant eux-mêmes - le conflit entre Serbes
et Albanais.
Savez-vous qu'à présent, Washington conclut des locations
de 99 ans pour les pistes de ses bombardiers ? Quelqu'un peut-il nous
expliquer en quoi des bombardiers aideront à résoudre les
problèmes des populations du Kosovo ? Les bases installées
aujourd'hui, ce sont les guerres de demain.
Un objectif stratégique plus vaste, alors ?
Michel Collon. Exactement. Cette base rapproche les bombardiers US de
Moscou et du Caucase. Elle fait partie du grand plan d'encerclement, car
Washington ne pense pas que Poutine et sa tendance seront nécessairement
éternels. Et briser la Yougoslavie faisait partie du plan global
en envoyant un message à tous les peuples du monde : si vous résistez
à la mondialisation, vous serez détruits.
Un éditorialiste du New York Times l'avait déjà clairement
expliqué, à la veille de la guerre: «Pour que la globalisation
marche, l'Amérique ne doit pas craindre d'agir comme la superpuissance
omnipotente qu'elle est. La main invisible du marché ne fonctionnera
jamais sans un poing caché. McDonalds ne peut être prospère
sans McDonnel Douglas, le constructeur de l'avion F-15. Et le poing caché
qui garantit un monde sûr pour les technologies de la Silicon Valley,
ce poing s'appelle armée des Etats-Unis, Air Force, Navy et Marines.»
Vous avez écrit plusieurs livres sur ces thèmes. Pourquoi
un film ?
Michel Collon. J'ai constaté que ce média permet de toucher
aussi ceux qui ne lisent pas, notamment chez les jeunes. Et de susciter
un débat. Nous vendons le film en cassette, très bon marché,
ce qui permet à chacun de l'offrir à un ami, un parent.
Ou d'organiser chez soi une petite projection + discussion.
Et c'est urgent car Monsieur Bush annonce qu'il va attaquer de nombreux
autres pays. Une bonne raison pour les progressistes de rediscuter ce
qui s'est passé en Yougoslavie. Les résultats de l'Otan
correspondent-ils à ses promesses ? Y avait-il d'autres intérêts
cachés ? A-t-on manipulé l'opinion par des médiamensonges
?
Vanessa Stojilkovic. Pendant toute la guerre, les médias occidentaux
m'ont fait beaucoup de tort. J'ai vite compris que les métiers
de l'image étaient l'outil idéal pour faire passer un message
et sensibiliser les gens à une cause. Et, en me rendant sur place,
j'ai compris : notre film permet à ces gens, bloqués dans
leur ghettos, de franchir les frontières et d'apporter ici leur
témoignage.
Votre thèse, c'est que la mondialisation mène à
la guerre ?
Michel Collon. Oui. La politique des multinationales ne fait qu'augmenter
l'écart entre riches et pauvres de cette planète. La guerre
est devenue la méthode n° 1 pour briser leurs résistances.
La guerre contre les Palestiniens et les Irakiens, le «Plan Colombia»,
l'agression contre le Congo par armées interposées, les
menaces contre l'Iran, la Syrie, la Corée, tout cela fait partie
de la même guerre globale.
Vanessa Stojilkovic. Il faudrait que la jeunesse antimondialisation s'informe
plus sérieusement sur ces guerres. On ne peut laisser un pays qui
a utilisé l'arme chimique Agent Orange, des bombes à l'uranium
et autre saloperies nous manipuler et nous faire croire qu'il mène
la guerre pour la liberté et les droits de l'homme. On ne peut
le laisser gouverner le monde et y organiser des guerres dans l'intérêt
financier de ses multinationales. Et je suis en colère aussi contre
les pays européens qui ont été complices et tirent
profit de cette guerre.
La Yougoslavie, c'est un avertissement à toute la planète
?
Michel Collon. Oui. Tout peuple qui ne veut pas vivre à genoux,
tout pays qui entend fixer lui-même son destin, sera frappé
par la guerre globale de Bush et ses amis. La seule issue est de créer
un grand front international de résistance à la guerre.
Qu'allez vous faire concrètement avec ce film, qui est déjà
traduit en six langues ?
Vanessa Stojilkovic. A la fin du film, Lajos, un vieil homme d'origine
hongroise, persécuté et immobilisé derrière
les barbelés d'un centre pour réfugiés, lance un
appel à l'opinion internationale : « Aidez-nous ! »
Notre devoir est de faire connaître leur drame partout où
ce sera possible. Nous le leur avons promis.
BON DE COMMANDE :
Bon de commande :
A renvoyer en mail à michel.collon@skynet.be
(Même adresse pour infos et organisation de projections débats)
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E-mail : .....................................
Commande :
O ........... exemplaires en français des Damnés du Kosovo
O ........... exemplaires en anglais The Damned of Kosovo
O ........... exemplaires en espagnol des Condenados de Kosovo
O ........... exemplaires en serbo-croate des Damnés du Kosovo
O ........... exemplaires en néerlandais De Verdoemden van Kosovo
O ........... exemplaires en italien I danato de Kosovo
O ........... veut être tenu au courant des parutions en allemand
et en arabe
PRIX : 9 Euros + port (Belgique: 2 ?, Europe : 3 ?, Autres : 4 ? ou $)
PAIEMENT :
Vous pouvez virer au compte 979-1390659-72 de Michel Collon, Liège,
Belgique.
Si vous virez de l'étranger, il faut mentionner :
CODE IBAN : BE38 9791 3906 5972
CODE SWIFT ARGENTA : AR SPBE22
PAIEMENT POUR LA FRANCE :
Egalement par chèque à l'ordre de Vanessa Stojilkovic, 19
rue Paul Painlevé 26000 Valence
CONSULTEZ LE SITE DU FILM : http://lesdamnesdukosovo.chiffonrouge.org
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